Les conséquences  de l’émergence des plateformes de e-hailing dans le paysage de la mobilité urbaine à Accra, capitale du Ghana

The Shiashi-East Legon trotro

The Shiashi-East Legon trotro and taxi station, Accra. The picture shows a trotro and taxi station in Accra, the taxi terminal being indicated by the blue and grey tents. Source: authors’ fieldwork

L’article retrace le contexte de l’arrivée de plusieurs plateformes privées de transport à la demande (e-hailing) à Accra et discute des conséquences multiples de l’émergence de ces nouveaux acteurs dans le paysage de la mobilité urbaine. En 2016, Uber a commencé ses activités à Accra, la capitale du Ghana, une ville à l’urbanisation rapide caractérisée par une très forte demande de mobilité urbaine. L’entrée d’Uber a été rapidement suivie par l’arrivée d’autres sociétés de e-hailing, tant étrangères que locales. Quelques années plus tard l’e-hailing est devenu un phénomène si populaire qu’au Ghana que les petites voitures économiques – les voitures généralement utilisées pour ce type d’activité – sont maintenant souvent décrites comme des « voitures Uber ». Dans le même temps, « chauffeur Uber » est devenu un emploi attractif pour (principalement) des dizaines de milliers de jeunes hommes. L’étude s’appuie sur des entretiens menés auprès d’acteurs publics et privés – notamment des chauffeurs utilisant les plateformes, des chauffeurs de taxi, des clients, des employés des plateformes, des représentants des syndicats de chauffeurs, des investisseurs locaux et des régulateurs – l’article détaille les conditions et les conséquences de l’installation des plateformes de e-hailing à Accra. Elle rappelle que la concurrence entre les plateformes a contribué à faire baisser le prix des courses pour les clients, au détriment des chauffeurs de e-hailing. Bien que confrontés à de nombreuses contraintes, les chauffeurs d’e-hailing ont tiré parti de la concurrence entre les plateformes pour revendiquer de meilleures conditions de travail.

Cette recherche révèle également que des entreprises comme Uber et Bolt ne sont pas soutenues uniquement par des capitaux internationaux. En fait, ces plateformes ne pourraient pas exister, ni survivre, sans les investissements quotidiens réalisés par les propriétaires de voitures et les chauffeurs locaux. Plus généralement, l’article soutient que l’avenir des plateformes de e-hailing au Ghana dépend d’un système plus large d’acteurs – plateformes, conducteurs, et passagers, mais aussi propriétaires des voitures, régulateurs, investisseurs internationaux, etc. Nous concluons que les changements dans ce système d’acteurs de la mobilité urbaine peuvent modifier considérablement le fonctionnement local des plateformes, ainsi que leur impact sur les conditions de travail des chauffeurs.

Cet article est issu du travail réalisé par Paola Pasquali durant son postdoc à Géographie-cités en 2020, recherche co-encadrée par Hadrien Commenges et Thomas Louail, membres de Géographie-cités. Paola a été lauréate en 2019 d’un appel à contrats de recherche postdoctorale de l’EHESS intitulé “Le tournant numérique dans les mobilités et l’aménagement urbain”. Elle a effectué un travail de terrain de deux mois à Accra au Ghana, au cours duquel elle a notamment conduit une trentaine d’entretiens individuels avec différents acteurs de la mobilité quotidienne à Accra. Paola est professeure à la Webster University à Accra (Ghana) et membre associée du laboratoire du laboratoire Géographie-cités.

P. Pasquali, H. Commenges, T. Louail. It’s a three-way ring”: E-hailing platforms, drivers and riders reshaping Accra’s mobility landscape. Case Studies on Transport Policy
Volume 10, Issue 3, September 2022, p. 1743-1753