Le cas de Nevers, ville moyenne du centre de la France (1971-2020)
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Nevers, ville moyenne de 33 000 habitants située dans le centre de la France, a longtemps été considérée comme un laboratoire du socialisme municipal et de l’union de la gauche. Le parti socialiste a dominé la scène politique locale pendant plus de quatre décennies. En 2014, cependant, une liste sans étiquette a mis fin à cette hégémonie en remportant l’élection. L’élection municipale de 2020 a confirmé le basculement : la liste sortante a remporté l’élection, cette fois au premier tour.
Comment expliquer ce changement durable dans une ville longtemps socialiste, au profit d’une liste » apolitique » qui ne bénéficie pas de ressources partisanes ? Si cette évolution s’inscrit dans un mouvement plus général, caractérisé par le déclin du Parti socialiste (PS) et du Parti communiste français (PCF), nous montrerons qu’elle s’enracine aussi dans les transformations sociodémographiques qu’a connues la ville au cours des dernières décennies. Comme beaucoup de villes moyennes françaises, Nevers est en effet confrontée à un phénomène ancien de déclin urbain, particulièrement marqué dans les quartiers centraux. Le départ des cadres et professions intermédiaires et l’arrivée de populations précaires ont contribué à la transformation de l’électorat, tandis que le thème du déclin est devenu l’un des principaux enjeux des dernières élections.
Cet article propose donc d’examiner l’évolution du champ politique local à la lumière des transformations sociales, économiques et démographiques du territoire. Pour ce faire, plusieurs bases de données sont utilisées afin de quantifier et de cartographier ces transformations : les résultats des élections municipales depuis 1971 et les données de recensement au niveau municipal depuis 1968 et au niveau des quartiers (Iris) depuis 1990. Ces données seront mises en perspective avec les archives relatives aux élections municipales de 1971 à 2020 ainsi qu’avec les entretiens et observations réalisés lors des campagnes de 2014 et 2020. En conclusion, le déclin urbain, dans le cas de Nevers, a contribué à affaiblir le socialisme municipal de deux manières : 1) en affaiblissant sa base électorale, 2) en imposant un agenda politique que l’équipe municipale socialiste ne peut tenir, ce qui lui sera reproché en 2014.
Géographe et politiste de formation, Achille Warnant s’intéresse dans le cadre de sa thèse, menée sous la direction de Marie-Vic Ozouf-Marignier, à l’évolution de l’action publique locale dans trois villes moyennes en décroissance du centre de la France (Montluçon, Nevers et Vierzon) des années 1970 à nos jours. Il travaille, d’autre part, sur l’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée menée à Prémery (Nièvre) et co-dirige, depuis juin 2021, l’Observatoire de l’expérimentation et l’innovation locales de la Fondation Jean-Jaurès.
