
L’équipe Épistémologie et histoire de la géographie (EHGO) existe sous cette appellation depuis 1987, date à laquelle elle prit le relais du Centre de géohistoire. Elle est la seule équipe CNRS dédiée à ces champs. Elle a participé à de nombreuses initiatives interdisciplinaires dès les années 1970 et n’a cessé depuis de dialoguer avec d’autres historiens et épistémologues des sciences humaines. À partir des années 2000, elle a ouvert son périmètre à de plus larges « savoirs de l’espace », incluant des travaux d’architectes et d’urbanistes, d’ingénieurs, de paysagistes, d’aménageurs, etc. Elle a également refait une place à la géohistoire et à la géographie historique.
L’équipe EHGO a développé un savoir hautement spécialisé, nourri de l’ensemble des transformations de l’historiographie et de l’épistémologie des champs qui lui sont connexes. Elle a toujours valorisé ou impulsé un travail collectif. S’attachant à mettre à jour l’élaboration des savoirs géographiques, elle n’en néglige pas pour autant l’histoire sociale des savants ou les contextes politiques ou cognitifs. Elle met l’accent sur une histoire longue des objets et sur les effets configurants des médiations (cartes, textes, schémas, catégories…) et des enjeux politiques, sociaux et institutionnels.
Thématiques
La thématique des écritures de la géographie souhaite prendre le mot écriture dans un sens large, qui recouvre aussi bien les productions textuelles que les iconographies produites par géographes et non-géographes (spécialistes des sciences sociales, historiens, artistes, écrivains). On sera attentif aux logiques sociales et cognitives impliquées dans ces diverses productions, ainsi qu’à leur historicité spécifique. Dans cette perspective, deux groupes de travail sont constitués.
Le groupe portant le séminaire « Les écritures du géographique » entend recentrer son travail sur quelques questions fortes : celle du « géographique » en se demandant dans quelle mesure et jusqu’à quel point il peut constituer un « commun » identifié comme tel ; la question de la « poétique » des lieux, des itinéraires, des paysages, etc., dont on peut se demander si elle peut être fédérée sous la formule d’une « poétique de l’espace » ou s’il s’agit là simplement d’une formule commode ; la question des pratiques à l’œuvre dans la critique littéraire savante lorsqu’elle s’empare de thèmes qui ont un « air de famille » pour les géographes. En outre, le séminaire entend développer une approche des écritures de géographes et des genres géographiques afin qu’elle constitue une épreuve symétrique du travail entrepris, ici et ailleurs, sur les (peut-être mal nommées) « spatialités littéraires ».
Le groupe de travail sur la forme-atlas souhaite continuer à explorer cette question dans plusieurs directions. Ainsi, l’histoire de cette forme dans le domaine propre de la géographie reste encore largement à écrire, notamment pour ce qui concerne les origines, mais aussi pour ce qui concerne la persistance de la formule des recueils et atlas composites au cours de l’époque moderne et contemporaine, persistance qui doit conduire à un réaménagement de l’historiographie et à une réévaluation de la place des formes composites de l’écriture cartographique. De même, restent à explorer de façon large les circulations et les potentialités cognitives et plastiques de la forme-atlas dans les cultures scientifiques, littéraires et artistiques modernes et contemporaines.
L’équipe EHGO propose de poursuivre et d’étendre sa réflexion sur les circulations de savoirs, en appréhendant les circulations comme « moments » de création des savoirs. Il s’agira non seulement de poursuivre l’enquête sur les échanges interdisciplinaires (principalement entre la géographie, les autres sciences sociales, voire au-delà) tout en continuant de questionner, dans le même temps, les échanges internationaux.
Les membres de l’équipe prolongeront leur examen des échanges entre savoirs scientifiques et savoirs de l’action, à travers des dossiers centrés sur la situation coloniale, en déplaçant l’enquête collective sur le tournant de la décolonisation, et sur l’administration des territoires sur le temps long. Un groupe de travail souhaite particulièrement travailler sur les trajectoires politiques des géographes, notamment dans la seconde moitié du XXe siècle, sujet qui est presque toujours étudié de manière monographique sans poser la question des tendances générales de la politisation des géographes, tributaire de conjonctures et de circonstances qui ont à la fois une dynamique interne, une morphologie et une forte hétéronomie.
La seconde direction de recherche mettra l’accent sur les fabrications des espaces dans le temps, en portant une attention particulière à la manière dont elles sont liées aux ré-élaborations des savoirs de l’espace, nés de la rencontre entre pratiques et savoirs. Deux objets géographiques seront privilégiés dans cette perspective de géographie historique : routes et réseaux et maillages.
David Rumsey (carte de collection personnelle)