Dans cet article, publié par dans le Bulletin de l’association des géographes français, Ivan Savchuk, expert en géographie économique, s’attache à analyser les relations étroites entre le développement de la céréaliculture et le transport national ukrainien, telles qu’elles se sont développées dans la décennie 2010 – 2020.
Contrôlées par les agro-holdings, les céréales sont en effet devenues un produit-phare d’exportation pour le pays, transformant profondément sa géographie agricole selon l’accessibilité régionale aux ports maritimes. Les combats à grande échelle engagés par la Russie en février 2022 ont radicalement bouleversé ce modèle en désorganisant au premier chef les capacités d’envois massifs par la voie maritime. Les modes ferroviaires et routiers, comme les options fluviales sont inaptes à réorienter les flux, tant par les tarifs élevés qu’ils imposent que par l’insuffisance des moyens de transport, ou simplement du fait de l’orientation géographique des infrastructures.
Rôle des céréales dans les exportations des régions d’Ukraine (2020)
Échelle : 1 : 12 000 000
Source : Données de Derzhstat traitées par l’auteur.
Ivan Savchuk revient sur les fondements du modèle agro-exportateur ukrainien, associant étroitement la production et le système national de transport. Il en montre la genèse et la logique économique sous-jacente pour en pointer les fragilités.
Les ports maritimes ukrainiens et les lignes ferroviaires de leur arrière-pays sont organisés en fonction des besoins d’exportation domines par les céréales.
À l’exception du port de Skadovsk, tous les ports se sont fortement engagés dans l’exportation de céréales. Le conflit meurtrier engagé par la Russie qui sévit depuis 2022 a démontré à contrario la puissance de cette évolution et le danger d’une telle situation : le blocus des ports maritimes a un impact négatif sur l’ensemble de l’économie nationale. La question de la production, de la gestion des stocks et du transport des céréales ukrainiennes pour l’exportation est devenue un enjeu national. Au moment de la reconstruction, il sera sans doute nécessaire de repenser à la diversification des exportations pour n’être pas aussi tributaire d’un système de production et d’une dépendance très forte vis-à-vis du marché mondial des produits agricoles.
Conclusion (40-41)
Ivan Savchuk, ancien chercheur à l’Université de la Défense nationale d’Ukraine, située à Kyiv, poursuit actuellement ses recherches en France, en tant que professeur invité de l’EHESS au sein du laboratoire Géographie-cités.
Il participe au programme franco-allemand Limspaces (2021 – 2024).
Lire / Voir aussi
Destruction du barrage de Kakhovka : quelles conséquences économiques ? Interview, Les Echos, 2023 (video)
En Ukraine, une économie en guerre Interview, Médiapart, 2023 (video)
