La vulnérabilité sociale est associée à un plus grand risque de quitter Paris lors d’un déménagement. Les aides au logement (allocations, logement social) jouent un rôle crucial dans l’atténuation de ce risque, en particulier dans les zones de forte tension des marchés et de surreprésentation des meublés touristiques. Tel est en substance le propos de l’article Those who leave: Out-migration and decentralisation of welfare beneficiaries in gentrified Paris publié dans la revue Urban Studies par Luc Guibard (CTRAD – CAF en Île-de-France, Université Paris Cité, UMR Géographie-cités) dans le cadre de sa thèse et Renaud Le Goix, professeur à l’Université Paris Cité et membre de Géographie-cités.
Au cours des 20 dernières années, l’inflation et la pénurie de logements abordables ont été particulièrement marquées à Paris. Les auteurs analysent quelle en sont les conséquences sur le déplacement des Parisiens à faibles revenus et sur la périurbanisation de la pauvreté. Cette nouvelle étude utilise les données sous convention de la CTRAD – Caisse d’allocations familiales (CAF) en Île-de-France, croisées avec des données sur les marchés locaux du logement, pour documenter les processus de mobilités sortantes (souvent appelés « évictions » dans la littérature) ainsi que des données ouvertes sur les prix de l’immobilier provenant d’Etalab (DVF) et des données d’InsideAirbnb pour analyser les prix et la pression du marché dans le centre de Paris.
La méthodologie repose sur des régressions logistiques analysant les variables explicatives d’un déménagement (composition familiale, revenus, mise en couple, venue d’un enfant, changement dans la situation professionnelle, aides au logement). Une analyse des variations en distance de l’accès aux ressources urbaines pour les ménages ayant déménagé est également réalisée.
Principales conclusions de l’étude :
– des revenus plus faibles, l’absence de revenus du patrimoine et le chômage sont associés à des risques plus élevés de quitter Paris ;
– le logement social joue un rôle important : il augmente considérablement les chances de rester à Paris, en particulier lorsque le marché local est soumis à des pressions plus fortes (facteurs prix et impact des meublés touristiques) ;
– les ménages moins aisés s’éloignent davantage du centre-ville lorsqu’ils déménagent ;
– la pauvreté est particulièrement discriminante pour les familles monoparentales ;
– les allocataires à revenus modérés (c’est-à-dire la classe moyenne inférieure) sont ceux qui s’éloignent le plus.
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